Une histoire de vélotafeur

Si vous aussi vous êtes sous le soleil d'un pays chaud, vous ne l'avez peut-être pas remarqué mais l'automne est bien là. L'automne et ses feuilles mortes. L'automne et son vent tempétueux. L'automne et ses pluies glacées. L’automne ou le cauchemar des vélotafeurs.

Un matin comme les autres

Un matin comme les autres, le soleil n’en était qu’à se lever. Le ciel encore un peu ensommeillé. La ville se réveillait peu à peu et comme beaucoup de matins de Novembre, la rue était déjà mouillée par la pluie avant que la journée ne commence.

Rue dans la nuit, la chaussée est mouillée

J’ai décidé pour cette année scolaire, de me rendre à vélo à mon école située à 2km de chez moi. Un peu d'exercice, un bon bol d’air le tout en faisant un petit acte pour la planète.

Ainsi, comme tous les matins à 7h30, je descends les marches de ma chambre étudiante pour retrouver mon vélo qui a passé la nuit sous sa bâche. Et comme tous les matins, même les plus pluvieux et venteux, c’est avec mon vélo que je m’apprête à commencer ma journée.


Que je m’apprête à commencer une journée pas comme les autres.


Et la pluie s’en mêle

Ce matin, comme beaucoup de matins lorsque le temps est mauvais, je retrouve ma fidèle monture dans les roses. Et ce n’est pas une image. Après m’être égratignée les mains pour sortir mon vélo de cette malheureuse situation, je remarque que mon frein avant ne répond plus.

J’enrage. J’en veux au vent et à ce mauvais temps, mais je n’ai pas le temps d’aller à pieds en cours ou je serai en retard.

Alors, comme tous les autres matins, j’enfourche mon vélo et je pars à l’assaut des rues qui commencent à s’éveiller.

Je remonte ma rue comme à mon habitude. La pluie se met à tomber mais je suis bien à l’abri sous mon Kway et mon casque. Malgré tout je dois commencer à grimper ma première côte de la journée. Premier effort, et ce n’est pas la dernière. Mais ce petit effort matinal me fait du bien et calme ma colère. Néanmoins, je suis inquiète quant à l’usage de mes freins. Le premier ne fonctionnait déjà pas très bien et voici que le second ne répond plus.

Arrivée au grand carrefour, j’arrive tant que bien que mal à m’arrêter et j’aborde la seconde côte de la journée. Le sol est glissant, la ville toujours noire, heureusement que mon vélo est bien éclairé, et c’est en nage que j’arrive au sommet de la seconde étape de la matinée.

A ce niveau, la piste cyclable se rétrécie pour rejoindre la route. Cependant, à cause de travaux sur la route, le passage pour piétons qui longe habituellement la piste cyclable est désormais inaccessible. Et c’est à moment qu’une étudiante surgit face à moi, son parapluie à la main et elle me fait face et continue son chemin. Continue son chemin comme si la route lui appartenait. Comme si j’étais en mesure de l’éviter.

Ce qu’elle ignore c’est que moi, je n’ai plus de freins.

Piéton avec un parapluie nuit pluvieuse

Faire du vélo sans freins

Je panique, sonne ma sonnette, essaie de lui faire comprendre que je ne peux pas l’éviter et que je ne peux pas freiner.

Mais c’est trop tard, la fille est prise en tenaille entre la route et les barrières qui délimitent les travaux.

Instinctivement, je ne peux pas lui foncer dedans, alors j’évite le danger, comme n’importe quel humain l’aurait fait, et je tourne le guidon.

Et soudain tout s’éteint.


Retour parmi nous

Le reste de l’histoire, c’est les témoins qui ont vu la scène qui me l’ont racontée. Lorsque j’ai évité la fille qui me faisait face, j’ai rejoint la route et la voiture qui passait par là n’a pas eu le temps de réagir que j’étais déjà sur son pare-brise. Etant sur un ralentisseur, sa vitesse n’était pas élevée et j’ai simplement fait un magnifique soleil en fonçant dans sa voiture. Magnifique soleil sous ce ciel pluvieux. Simple soleil je ne sais pas, puisque j’ai perdu connaissance lorsque ma tête a touché le sol et m’a plongée dans le noir complet.

Ce jour-là, j’ai eu de la chance. Etant bien habillée pour la saison j’ai souffert de peu d’égratignures et le choc n’étant pas trop violent je n’ai rien eu de cassé. Mais plus que tout ce jour-là, j’ai évité toute blessure grave à la tête grâce à mon casque.

Je ne l’ai jamais autant aimé qu’à mon réveil aux urgences. Les médecins m’ont dit que les choses auraient pu mal tourner et que j’ai eu de la chance. En revanche, je suis peu fière de moi. Même si j’étais protégée, j’ai mis en danger trois personnes ce jour-là. Le piéton, l’automobiliste et moi-même. Parce que je n’aurai jamais dû utiliser un vélo aux freins défectueux.

Même si tout est bien qui finit bien, et que j’ai changé mes câbles de freins après cet incident, j’ai appris de mes erreurs. Plus d’excuses aujourd’hui. Même si mon casque est encombrant, moche et qu’il me décoiffe, je ne sortirai plus jamais à vélo sans lui. Et désormais, je n’utiliserai pas mon vélo si son état est défectueux ou si son entretien quotidien est laissé à désirer.

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